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Les banques ont-elles besoin de communication citoyenne ?

Les banques ont-elles besoin de communication citoyenne ?

Bien présentes dans l’univers publicitaire, les banques ont adopté au fil des décennies des stratégies de communication variées, s’adaptant à leur positionnement et la perception du grand public. L’agence Bolivie vous propose un tour d’horizon, pour se poser une question : la banque n’est-elle pas devenue une institution devant adopter une communication citoyenne ?

Les banques : une histoire qui influence la perception du grand public

Depuis plus d’un siècle, les banques françaises sont passées de la nationalisation à la privatisation et inversement. En cause : les circonstances économiques et le changement au fil du temps des stratégies étatiques, avec tantôt un rôle de protecteur, tantôt de régulateur, tantôt d’actionnaire. Ces variations de statut ont bien évidemment engendré des effets sur la communication des banques, sur leurs services et sur la perception du grand public.

Fin 19ème : les banques au service de la croissance nationale

Alors que survient la crise de 1828, la France souhaite doper son industrie et pour ce faire, de grands projets d’infrastructures doivent voir le jour. Or, les banques existantes ne génèrent pas assez d’épargne pour financer ces grands travaux. De nouvelles structures financières sont créées comme le Comptoir d’escompte de Paris en 1848 ainsi que le Crédit Foncier et le Crédit Immobilier en 1852. Objectifs : attirer plus d’épargnants pour financer ces grands projets. Malgré l’ambition, ces établissements ne permettront pas d’engendrer cette masse de capitaux nécessaires, et c’est grâce à la collecte des dépôts que tout pourra être mis en place. Cette nouvelle activité consiste, pour les banques, à démarcher tous leurs déposants pour placer leur argent autrement. Ce nouveau service bancaire est né avec de nouvelles banques commerciales : le Crédit Industriel et Commercial (1859), Le Crédit Lyonnais (1863) et La Société Générale (1864).
En 1870, la guerre contre la Prusse entraîne des retraits massifs des déposants qui seront accentués par les crises de La Grande Dépression de 1873 à 1896. Cela engendre des conséquences pour les banques de dépôts, qui jusque-là, avaient été d’un grand soutien pour financer les grands projets industriels. Ces crises amènent le monde bancaire à se positionner dans deux catégories différentes, avec des banques qui poursuivront le financement de grands projets grâce à leurs ressources et leurs participations permettant des financements longs, les banques d’affaires, et d’autres qui se contenteront de créer des crédits à court terme et des opérations d’escompte.

Les guerres mondiales et l’inflation chamboulent le fonctionnement des banques

Dès le début du 20ème siècle, l’offre bancaire française est donc déjà diversifiée. L’économie libérale domine le système financier.
La Première Guerre mondiale vient troubler le bon fonctionnement du système en provoquant des retraits massifs.
La sortie de la guerre va entraîner une forte inflation à laquelle s’ajoute le non-remboursement des emprunts russes. Malgré la situation, l’État n’interviendra pas. Seules les banques spécifiques dites mutualistes comme la Caisse Nationale du Crédit Agricole pour les agriculteurs en 1920 et 1926, Les Banques populaires pour les PME et artisans en 1917 ont bénéficié de l’exception d’intervention de l’État. Les banques de dépôts ne réalisent plus que des crédits que pour le très court terme. Côté banque d’affaires, le contexte européen tendu les oblige à aller chercher des investissements à l’étranger et dans les colonies françaises.
L’État finit par intervenir en stabilisant le franc avec Poincaré entre 1926 et 1928. Il crée de nouveaux outils bancaires comme les comptes chèques postaux en 1918, le Crédit National en 1919 via la Caisse des Dépôts. Enfin, l’arrivée du Front populaire va permettre de réformer la Banque de France.
La crise des années 30 vient renforcer l’intervention de l’État dans l’économie. Durant cette période, un quart des banques disparaît. Ainsi, une seconde vague de nationalisation est conduite en 1936 par le Front populaire.
L’arrivée de la Seconde Guerre mondiale va entraîner un très grand contrôle de l’État sur les banques. Le régime de Vichy ira jusqu’à mettre en place une instance de contrôle et de réglementation spécifique.

La reconstruction de la France et les grandes nationalisations

Après la Seconde Guerre mondiale, l’heure est à la reconstruction de la France. Il faut aller vite et faire face aux investissements massifs. L’État nationalise alors les secteurs indispensables : l’énergie avec EDF et GDF, l’industrie avec Air France et Renault, mais aussi la finance avec la Banque de France, Le Crédit Lyonnais et La Société Générale. Une Loi vient cloisonner les activités de dépôt et d’investissement. Le secteur bancaire et financier se développe alors à grands pas profitant de la forte croissance économique due à la reconstruction, mais pas seulement. Un nouveau phénomène apparaît : la bancarisation des ménages qui deviennent une cible de choix pour les banques.
Dans les années 1950-1960, l’économie française connaît une troisième vague de nationalisation. Cette fois-ci, cela touche les secteurs techniques liés à la sécurité et la souveraineté de la France : l’aérospatiale, le transport de Pipeline et l’énergie atomique.

François Mitterrand face au libéralisme mondial

En 1982, l’arrivée au pouvoir du président socialiste, François Mitterrand, dont le programme engageait l’interventionnisme économique de l’État, une trentaine de banques vont être nationalisées. Objectifs : contrôler des secteurs-clés de l’économie. Cela prendra fin rapidement. Le contexte inflationniste, les mauvais résultats de ces politiques et les tendances pro-libérales mondiales (Margaret Thatcher et Donald Reagan), vont amener à un changement de gouvernement qui va faire machine arrière. L’arrivée de Jacques Chirac comme Premier ministre entraîne une privatisation des banques qui avaient été nationalisées. Objectifs : libérer l’économie, réduire les interventions de l’État, attirer les capitaux privés. C’est ici une révolution bancaire qui va déréglementer l’activité intensifiant la concurrence. Ces privatisations se sont poursuivies jusqu’en 2005. Elles marquent une rupture brutale dans le marché bancaire qui se mondialise et se transforme avec l’intensification de la finance.

Évolution de la perception de l’image de la banque par les consommateurs et du positionnement

Le rôle originel des banques

Les banques sont des institutions essentielles pour l’économie tout comme les administrations et les ménages. Mais elles ont une fonction originellement spécifique : celui de financer l’économie en affectant des disponibilités financières à des besoins de financement spécifique. C’est un rôle primordial puisqu’il ne peut y avoir de croissance sans financement. Le rôle des banques est donc de mettre en relation les épargnants qui deviennent des prêteurs à ceux qui ont besoin de financement, les emprunteurs. Dans ces projets de financement, les banques interviennent comme des organismes de contrôle de la viabilité du projet et en sont donc les garants de tous risques financiers.
Dans les années 70, ce rôle se ressent dans la communication des banques où la question de la responsabilité économique est fortement présente.

Le crédit facile de la fin des années 80

Les banques ont, néanmoins, modifié leur activité en créant des produits financiers avec parfois une certaine opacité sur les risques encourus. C’est ainsi qu’au milieu des années 90, les banques se présentent comme toutes-puissantes dans les publicités. C’est l’époque du crédit facile.

La crise des subprimes

Mais cette image positive du crédit et des établissements qui la confère va être mise à rude épreuve avec la crise des subprimes de 2008-2009. Cette crise, faisait suite à la vente de produits financiers risqués en contrepartie de crédits à taux variable. Cela a favorisé une bulle immobilière, et endetté de nombreux particuliers. Cela a concrètement eu pour effet de faire participer les banques à de la création monétaire. Or, l’émission de monnaies est une fonction régalienne qui appartient à la souveraineté de l’État.
La perception des banques auprès du grand public a changé. Un fossé considérable s’est créé avec le grand public qui a découvert un flou dans l’activité bancaire et financière devenu bien trop complexe et opaque. Les problèmes de tarifications bancaires ont alors vu le jour. Cette crise économique a mis en lumière un dysfonctionnement des règles bancaires qui a effrayé les ménages. L’intérêt général n’était plus la préoccupation des banques.
Les banques centrales ont accouru au secours de ces banques et l’inquiétude était présente, renflouant un système financier menacé d’implosion. Les banques ont dû œuvrer dans leur communication pour développer des notions de proximité, de transparence et de sécurité. C’est toute la confiance envers les banques qui a du être reconstruite. Le scandale de l’affaire Kerviel y a fait aussi beaucoup. Un an après s’être sorti de cette affaire, la Société Générale sortait un long spot de pub télé d’une minute, signé Fred & Farid, mettant en scène une équipe de rugbyman suant dans une mêlée, un patron de PME négociant une rallonge de crédit et un couple ouvrant une lettre de leur banque avec soulagement. La banque souhaitait revaloriser son image, valoriser la proximité avec ses clients, et faire valoir son métier de base : son soutien à l’économie. Une baseline efficace avait été déployée : « Développons ensemble l’esprit d’équipe. ». Au même moment, la BNP Paribas centrait sa communication sur « les vrais gens » : vrais clients et vrais conseillers, acteurs de l’économie, qui parlent vrai en faisant appel à l’agence Publicis. On se souvient aussi du « Bon Sens », du Crédit Agricole ou encore de « LA banque à qui parler » du Crédit Mutuel.
Il y a peu encore, malgré ces efforts de communication et de transparence, les banques sont exposées à certains préjugés. Certaines sont pointées du doigt par des associations pour leur participation passive à des opérations de blanchiment, d’évasion fiscale et de corruption. La multiplicité des activités de certaines banques peut faire jaillir des conflits d’intérêts voir des délits d’initié.
Mais les choses évoluent. De nouveaux acteurs sont entrés sur scène sur les opérations de finance, permettant de rééquilibrer le rôle des banques et une distinction entre les activités de détails où la banque n’est qu’un intermédiaire classique aux activités de marché s’opérant sur les marchés financiers.

La recherche de confiance et de responsabilité sociale et environnementale

Aujourd’hui, la communication des banques a de nouveau pris un virage. C’est cette fois, leur crédibilité et leur responsabilité qui sont mises en avant. Leur objectif reste toujours le même : regagner la confiance de leurs clients. Les démarches RSE et de développement durable servent d’arguments. Mais elles doivent désormais prendre un nouvel usage en compte : Internet, qui vient bousculer les habitudes clients et les amène à proposer des services innovants. Car désormais, une autre tendance s’impose : la proximité digitale et la proximité réelle.

Les banques sont-elles un service public ?

Au regard de notre économie, les banques peuvent être envisagées de deux façons : comme une entreprise comme une autre dont l’objectif est de produire de la valeur ou comme un délégataire de service public chargé de gérer les moyens de paiement et de distribuer des crédits. Ce dernier point est loin d’être burlesque, car rappelons-le, la banque à bien des égards a une participation active à la puissance publique notamment pour financer son développement.

Les banques : une utilité sociale

Aujourd’hui, on ne peut rien faire sans compte en banque. D’ailleurs, une des missions des banques est de favoriser l’accès à tous à un compte bancaire. L’exclusion bancaire s’avère être un handicap social. Pour éviter cela, les banques doivent veiller à éviter les surendettements et refuser systématiquement les prêts s’il n’y a pas de garanties suffisantes. En France, en 2010, selon la Banque de France, 778 500 ménages étaient considérés comme surendettés, ce qui interroge sur la responsabilité des banques, mais aussi d’autres organismes dont on parle moins, le monde du microcrédit. Pourtant, les banques n’organisent pas de grandes campagnes d’informations auprès de leurs clientèles, comme si on ne dénonçait pas les actes de l’arrière cousin parce qu’on fait partie d’une même grande famille.

Des attentes fortes des consommateurs

Les Français souhaitent maintenir un lien de confiance avec leur banque. Ils tiennent à rester proches. Cette recherche de proximité se traduit à la fois en physique et sur le digital. 83 % des français souhaitent avoir de choix de recourir à Internet ou à leur agence. Le jour n’est donc pas venu où il y aura 100 % des agences entièrement sur le digital.
La sécurisation des données bancaires est un autre sujet d’inquiétude des consommateurs qui attendent que les banques apportent le maximum de sécurité sur leurs informations et opérations.

Des changements de perception depuis le Covid-19

La crise sanitaire a mis les banques à contribution qui ont aidé les entreprises avec les PGE (Prêts Garantis par l’État). Ainsi, plus de 1 650 milliards d’euros en France, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Italie et en Espagne ont été garantis entre 70 % et 100 % par une banque publique. Les banques ont été ainsi perçues comme une industrie nationale puissante. Cette crise a modifié le rapport entre le grand public et les banques, les liens se sont renforcés. La nécessité de disposer d’une industrie bancaire nationale puissante fait plus que jamais consensus et suscite l’adhésion de 83 % des Français. Depuis, les banques sont jugées par les Français comme l’un des secteurs les plus stratégiques.

La nouvelle inflation

La crise économique mondiale que nous traversons ces derniers mois montre à quel point la bonne santé de l’économie dépendant de l’accès au crédit. La banque apparaît comme essentielle pour structurer l’économie moderne. Au point de se demander, si la banque n’est pas une institution.


Conclusion

L’histoire démontre le rôle fondamental des banques dans le développement de notre puissance économique et donc de la puissance étatique. Lorsqu’elle s’est trop libéralisée, c’est toute l’économie mondiale qui a été bouleversée. Devenue essentielle socialement, la banque pourrait communiquer comme une institution et ainsi s’adresser à des citoyens et non à des consommateurs…


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