Rapport de durabilité, reporting de durabilité, rapport RSE : quelles nouveautés 2025 et quel premier bilan établir ?

Nouveautés CSRD 2025 : assouplissements et reports 

Transposition et oppositions 

En France, la directive a d’abord été transposée par l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 et le décret n° 2023-1394 du 30 décembre 2023.  
Une grande consultation publique sur la révision du reporting ESG de la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) a eu lieu entre juin et juillet 2023. Les débats ont alors opposé les entreprises partisanes d’un allègement de la réglementation et les sociétés et associations travaillant pour un capitalisme plus responsable.​ Ainsi, certains lobbies économiques ont dénoncé un trop grand nombre de critères évalués (400) ainsi que la pondération différente selon les entreprises, créant de la confusion pour les investisseurs. De l’autre côté, de nombreuses associations d’investisseurs responsables, des sociétés de gestion ainsi que 10 eurodéputés, ont estimé que le texte était trop léger et qu’il manquait d’ambition aux vues des enjeux écologiques et sociaux. Il est vrai que la Commission européenne prévoyait notamment de permettre aux entreprises de ne pas publier d’informations sur certains critères environnementaux si elles estiment ne pas être concernées. Elle offrait aussi un délai plus long pour les entreprises de moins 750 salariés pour publier les émissions de gaz à effet de serre de leurs sous-traitants.​
Dès la fin de l’année 2024, la France s’était positionnée en faveur d’un allègement des obligations issues de la CSRD, et appelait à un report pour les entreprises non cotées et un allègement des exigences de reporting. Michel Barnier, alors premier ministre, demandait « une forme de moratoire qui puisse reporter de deux ou trois ans la date d’entrée en vigueur de réglementations très lourdes […] des normes et des contraintes déraisonnables ».  “Nous alertons depuis de longs mois sur le choc de complexité porté par ces textes sur la compétitivité, la croissance et l’emploi : […] les coûts supplémentaires colossaux que ces réglementations mal conçues font porter sur nos entreprises.”, exprimaient la CPME, le METI et l’ANSA dans un communiqué commun. 

La Loi DDADUE d’avril 2025

Suite à ces oppositions, La Loi DDADUE a été votée le 30 avril 2025 et permit diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne, notamment en intégrant le dispositif “Stop-the-Clock”. Ce texte a permis d’intégrer rapidement certains ajustements proposés sans attendre l’adoption définitive des actes délégués au niveau européen.

3 mesures principales ont été inscrites dans cette loi :

  • Le report de deux ans pour les entreprises des vagues 2 et 3, avec une première publication désormais attendue en 2028 ou 2029 selon les cas ;
  • La suppression des sanctions pénales en cas d’absence de nomination d’un commissaire aux comptes ou d’un organisme tiers indépendant chargé de la vérification des informations de durabilité ;
  • La possibilité de ne pas publier certaines informations sensibles dans le rapport déposé au greffe, à condition qu’elles soient transmises à l’AMF.

La Loi Omnibus

Présentée en février 2025 par la Commission européenne, c’est, il y a quelques jours, en Novembre 2025 que le parlement européen vote par 382 voix contre 249 le paquet législatif dit «Omnibus I».
Cette Loi Omnibus est venue modifier les conditions de reporting initialement prévues par la Corporate sustainability reporting directive (CSRD), dans des objectifs de simplification. Voici les principaux changements : 

Changement de calendrier de la CRSD

  • Vague 1 : Pas de changement pour les grandes entreprises cotées, qui répondent à au moins deux des trois seuils suivants : 500 salariés, 50 M€ de chiffre d’affaires et/ou 25 M€ de bilan, elles ont déjà publié leur premier rapport au premier semestre 2025, et appliquent déjà l’ensemble des exigences de la CSRD.
  • Vague 2 : Report de 2 ans pour les grandes entreprises non cotées. Elles devaient à l’origine publier un rapport de durabilité en 2026 (pour le compte de l’exercice 2025, exigence repoussée en 2028, sur les données de 2027.
  • Vague 3 : Plus d’obligations pour les PME cotées même en 2029. En revanche, un cadre volontaire (la norme VSME) est mis à leur disposition si elles souhaitent structurer leur reporting RSE.

Le déploiement progressif de la CSRD laisse aux entreprises françaises un délai supplémentaire pour se préparer, tout en confirmant que la mise en conformité deviendra incontournable à moyen terme.

Modification du périmètre des entreprises concernées par la CSRD 
Le Parlement européen a relevé le seuil des entreprises concernées par la CSRD, à plus de 5 000 employés et plus d’1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires annuel. Les eurodéputés ont également supprimé le régime de responsabilité civile européenne, qui servait à harmoniser les obligations des entreprises et leurs responsabilités en cas de manquements.
Désormais, son seuil d’application a été rehaussé pour ne s’appliquer qu’aux entreprises de plus de 1 750 salarié·es et 450 millions d’euros de chiffre d’affaires – celles de plus de 250 salarié·es étaient concernées auparavant. Avant cette Loi, seules les PME cotées (effectif de moins de 250 personnes ne dépassant pas 50 millions d’euros ou un bilan ne dépassant pas 43 millions d’euros) étaient concernées par la LSME. Or, après la directive omnibus, l’obligation de reporting avec la norme LSME ne concerne plus que les entreprises de plus de 1 000 salariés avec un CA de 50 MS ou un bilan de 25 MS. Même si la Loi Omnibus dispense désormais cette déclaration obligatoire pour de nombreuses entreprises, elle devient obligatoire en 2026 pour les autres, ce qui implique un reporting à déclarer en 2027, avec un report possible en 2028… 

Limitation du nombre d’informations
La Commission et le Parlement s’accordent pour limiter le nombre d’informations à renseigner. La commission suggère aussi de supprimer les normes spécifiques qui devaient détailler les obligations par secteur et le parlement propose de les rendre facultatives. 

Les deux institutions souhaitent également que la norme dite VSME, dédiée aux petites entreprises souhaitant se conformer volontairement à la CSRD, serve pour établir le nombre et la nature des d’informations susceptibles d’être demandées par les grandes entreprises à leurs petits partenaires commerciaux pour connaître leur impact total sur leur chaîne de valeur. 

CSRD : QUEL PREMIER BILAN EN 2025 ?
Depuis son entrée en vigueur, la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) n’a cessé de faire débat : retards de transposition, normes jugées trop complexes, rapports de durabilité partiels… Depuis quelques jours, les choses évoluent : report pour certaines entreprises, seuils relevés, exigences allégées via le paquet législatif Omnibus I. Mais on peut se demander si la CSRD n’est pas en train de s’essouffler ? Au premier semestre 2025, les grandes entreprises cotées ont déjà rendu un premier reporting. Quels en sont les résultats ? 

Des dispositions incomprises et un manque de compétences pour répondre aux obligations 
Dans son étude de novembre 2023 intitulée “CSRD : les entreprises sont-elles prêtes à relever le défi ?”, Baker Tilly révèle que 57% des entreprises se disent mal informées sur leurs obligations liées à la CSRD. 7% seulement estiment avoir un système de reporting fiable. 
Une autre étude menée par Normative, estime que seules 54% des organisations où la CSRD s’applique déclarent disposer de compétences ou connaissances spécifiques des ESG (environnemental, social, gouvernance). 

La durabilité n’est plus un moteur stratégique de création de valeur pour les entreprises françaises
On y a tous beaucoup cru après le COVID-19, les entreprises responsables et durables avaient un rôle économique clé à jouer. Malheureusement, le critère de durabilité n’est plus dans le top 5 des priorités des dirigeants français. Certes, 80% de ces dirigeants indiquent que leurs investissements ont augmenté en matière de durabilité, il n’en reste pas moins que la crise économique empiète sur les ambitions morales et font que les perspectives économiques et les défis liés à la chaîne d’approvisionnement (supply chain) représentent désormais une préoccupation fondamentale pour les organisations françaises (44 %). Autre point priorisé par les entreprises : l’adoption des technologies et l’innovation restent des axes stratégiques prioritaires, seuls 37 % des dirigeants français (contre 44 % dans le monde) les classent parmi les trois principales priorités.

Un affaiblissement par la fin des sanctions pénales 
Comme vu précédemment, la suppression des sanctions pénales a été ordonnée par la Loi DDADUE d’avril 2025. Marc Ferracci, Ministre chargé de l’Industrie a défendu pendant les débats parlementaires : « Dans la pratique, il est apparu que les sanctions pénales prévues pour des informations extra-financières, dont les standards sont encore en cours de consolidation – absence de normes européennes d’audit, informations qualitatives pouvant apparaître subjectives… –, étaient disproportionnées. Des manquements pourraient être observés en raison des incertitudes sur les normes applicables, en particulier dans le contexte actuel d’évolution du droit européen (…) ». Les sénateurs ont quant à eux défendu ces mesures considérant qu’il était nécessaire de « corriger une surtransposition de la directive CRSD » en supprimant des dispositions « créant des obligations disproportionnées pour les entreprises françaises ». Les opposants à la suppression du délit d’entrave à la mission de durabilité ont eux considéré que cette suppression fragilise le dispositif CRSD car ce délai garantissait l’indépendance et l’efficacité des contrôles. Pour la sénatrice Florence Blatrix Contat, « un cadre contraignant est (…) nécessaire pour assurer l’effectivité des obligations de transparence ». On doute en effet que cette suppression aide à la lutte contre le greenwashing. 

Le ministre Marc Ferracci a tout de même précisé lors du débat du 10 mars 2025 : « Cela ne conduira pas à une absence de sanction, puisque le juge pourra toujours prononcer une injonction sous astreinte et que le Gouvernement cherche des peines alternatives en aménageant le droit des nullités ».
L’ordonnance du 12 mars 2025 portant réforme du régime des nullités en droit des sociétés a effectivement prévu la nullité des délibérations de l’assemblée générale ordinaire de l’entité assujettie à la CSRD en cas d’absence de désignation « d’un commissaire aux comptes ou d’un auditeur des informations en matière de durabilité, lorsque leur mission leur est confiée par la loi ou le règlement » (article L. 821-5 du code de commerce modifié). 

Le CRSD sauvé par l’IA ?
L’entreprise KPMG révèle qu’ “Excel reste l’outil le plus utilisé pour la collecte des données ESG” et que 71 % des entreprises utilisent des solutions bureautiques traditionnelles.
La collecte des données paraît en effet fondamentale pour effectuer ce reporting. Le calcul des chiffres les plus élogieux pour une entreprise peut s’avérer un travail de titan. Or, seulement 24 % des entreprises ont adopté des outils digitaux dédiés à la CSRD. Ces investissements sont souvent très coûteux et sont donc repoussés après le premier reporting CSRD en raison des priorités budgétaires. Pourtant, la technologie et l’IA s’imposent comme de puissants leviers pour transformer ces initiatives durables pour en faire de véritables moteurs de valeur durable et de résilience. France Global révèle que 86% des entreprises interrogées ont utilisé l’IA pour faire progresser ses efforts en matière de développement durable. L’IA permettrait de mesurer précisément l’empreinte environnementale, de répondre aux attentes des parties prenantes et d’identifier les solutions durables les plus efficaces et les plus adaptées. Mais ces reportings reflèteront-ils alors la réalité ou seront-ils un pur artifice que s’offre les entreprises qui en ont les moyens pour se donner une belle image ?

Les résultats de la première vague du reporting de durabilité
La société KPMG a réalisé un bilan à travers l’analyse de 51 projets CSRD répartis sur 14 secteurs. Ce qu’il faut retenir :

  • La flexibilité réglementaire a entraîné moins de données que prévues.
  • Les priorités des entreprises sont : – égalité et traitement – atténuation du changement climatique – Lutte contre la corruption
  • Des projets pilotés à 45% pour la RSE.
  • 65% des entreprises indiquent avoir des difficultés pour récolter les données.
  • 49 % des plans de transition sont jugés conformes aux exigences de l’ESRS E1.

Conclusion : 
Il reste encore beaucoup de travail pour avoir des données fiables. Cela montre l’ampleur de la tâche qui va assurément amener à une transformation du fonctionnement des entreprises et devenir un véritable levier de transformation environnementale.
L’agence Bolivie met à votre disposition des équipes de journalistes, rédacteurs, graphistes et chefs de projet pour réaliser vos rapports de durabilité, reportings et rapports RSE. 

@Anne Gaudron

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